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La guerre 14/18 dans la région Artois
24 janvier 2020

Soldat de 2ème classe Julien BRIGNON, fusillé pour désertion

Transcription de jugement :

Soldat de 2ème classe BRIGNON Julien du 149ème Régiment d’Infanterie, 3ème compagnie.

_________________________________________________

N° de jugement : 195-164.

N° d’Ordre : 241.

Date du crime ou délit : 28 août – 23 septembre et jours suivants – 2 octobre 1915.

Jugement rendu par le Conseil de guerre aux armées de la 43ème Division d’Infanterie, séant au Quartier Général, à Hersin-Coupigny (Pas-de-Calais).

--------------------------------------------------

Au nom du Peuple Français,

Le conseil de guerre aux armées de la 43ème Division d’Infanterie a rendu le jugement dont la teneur suit :

Cejourd’hui vingt-cinq octobre an mil neuf cent quinze,

Le Conseil de guerre aux armées de la 43ème Division, composé, conformément aux articles 3, 10, 33 et 35 du Code de Justice militaire, de MM.

  1. Le chef de bataillon COLLET du 158ème Régiment d’Infanterie,
  2. Le chef d’escadrons FERSIER commandant les trains régimentaires de la 43ème Division,
  3. Le Capitaine RONDET du 4ème Régiment de Chasseurs à cheval (commandant le 3ème demi-régiment,
  4. Le sous-lieutenant FOUCHER du 158ème Régiment d’Iinfanterie,
  5. L’adjudant PETIT du 12ème Régiment d’Artillerie de campagne,

Tous nommés par le Général de Division, commandant la 43ème Division.

Mr le Lieutenant TOUSSAINT-MAURIEE, Commissaire du Gouvernement ;

Mr l’Officier VIRIOT Henri, greffier près ledit Conseil ;

Lesquels ne se trouvent dans aucun des cas d’incompatibilié prévus par les articles 22, 23 et 24 du Code précité ;

Le Conseil, convoqué par l’ordre du commandant, conformément à l’article 1 du Code de justice militaire, s’est réuni dans le lieu ordinaire de ses séances, en audience publique, à l’effet de juger le :

Soldat de deuxième classe BRIGNON Julien du 149ème Régiment d’Infanterie, 3ème compagnie, fils de Albert (BRIGNON) et de ADRIAN Virginie, né le 4 février 1887 à Hakenbach, département de l’Alsace-Lorraine, profession de bûcheron, résidant, avant son entrée au service, à Moussey, canton de Lenonnes, arrondissement de Saint-Dié, département des Vosges.

Taille d’un mètre 620 millimètres, cheveux noirs, visage ovale.

Marques particulières :

N° matricule au corps : 02018.

Accusé d’avoir :

1/ Le 28 août 1915, à Eps (Pas-de-Calais), territoire en état de guerre, abandonné son poste.

2/ Le même jour, au même lieu, commis le délit de grivèlerie au préjudice de la dame DUQUESNE, débitante à Eps.

3/ Le 23 septembre 1915, à Sains-en-Gohelle (Pas-de-Calais), au lieudit la Fosse 10, territoire en état de guerre, abandonné son poste en présence de l’ennemi.

4/ Le même jour ou les jours suivants, entre le 23 septembre 1915 et le 1er octobre 1915, au même lieu, déserté en présence de l’ennemi.

5/ Le 2 octobre 1915, au même lieu, déserté en présence de l’ennemi.

 

Condamnations antérieures :

1er au 4 juin 1915. Ivresse publique et manifeste. 6 semaines de prison (Conseil de guerre aux armées de la 43ème Division).

2 au 24 août 1915. Désertion à l’intérieur en temps de guerre. 2 ans de travaux publics (Conseil de guerre aux armées de la 43ème Division).

 

La séance ayant été ouverte, le Président a fait apporter et déposer devant lui, sur le bureau, un exemplaire du Code de justice militaire, du Code d’instruction criminelle et du Code pénal ordinaire, et ordonné à la garde d’amener l’accusé, qui a été introduit, libre et sans fers, devant le Conseil, accompagné de son défenseur (non précisé).

 

Interrogé de ses nom, prénoms, âge, lieu de naissance, état, profession et domicile, il a répondu se nommer BRIGNON Julien, âgé de vingt-huit ans, né à Vakenbach (Alsace-Lorraine), célibataire, bûcheron, demeurant à Moussey (Vosges).

 

Le Président, après avoir fait lire par le greffier l’ordre de convocation, le rapport prescrit par l’article 108 du Code de justice militaire, et les pièces dont la lecture lui a paru nécessaire, a fait connaître à l’accusé les faits à raison desquels il est poursuivi, et lui a donné, ainsi qu’au défenseur, l’avertissement indiqué en l’article 121 dudit Code ;

Après quoi, il a procédé à l’interrogatoire de l’accusé. Aucun témoin n’a été entendu à l’audience.

Ouï M. Le Commissaire du Gouvernement en ses réquisitions tendant à ce que l’accusé soit déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés et qu’il lui soit fait application des articles 213, 239 du Code de justice militaire et 401, alinéa 4 du Code pénal.

Et l’accusé dans ses moyens de défense, tant par lui que par son défenseur, lesquels ont déclaré n’avoir rien à ajouter à leurs moyens de défense, et ont eu la parole les derniers, le Président a déclaré les débats terminés, et il a ordonné au défenseur et à l’accusé de se retirer.

L’accusé a été reconduit par l’escorte à la prison ; Le Commissaire du Gouvernement, le greffier et les assistants dans l’auditoire se sont retirés sur l’invitation du Président ;

Le Conseil délibérant à huis clos, le Président a posé les questions, conformément à l’article 132 du Code de justice militaire ainsi qu’il suit :

  L’accusé BRIGNON Julien, soldat de deuxième classe au 149ème Réiment d’Infanterie, 3ème compagnie, est-il coupable d’avoir, le vingt-huit août mil neuf cent quinze, à Eps (Pas-de-Calais), abandonné son poste ?

2° Ledit abandon a-t-il eu lieu sur un territoire en état de guerre ?

3° L’accusé BRIGNON est-il coupable de s’être le même jour, au même lieu, sachant qu’il était dans l’impossibilité aboslue de payer, fait servir des boissons et aliments qu’il a consommés dans un établissement à ce destiné, tenu par la dame DUQUESNE débitante à Eps ?

4° L’accusé BRIGNON est-il coupable d’avoir, le vingt-trois septembre mil neuf cent quinze à Sains-en-Gohelle Pas-de-Calais), au lieu dit la Fosse 10, abandonné son poste ?

5° Ledit abandon a-t-il eu lieu sur un territoire en état de guerre ?

6° Ledit abandon a-t-il eu lieu en présnec de l’ennemi ?

7° L’accusé BRIGNON est-il coupable d’avoir le même jour ou les jours suivants, entre le vingt-trois septembre et le premier octobre mil neuf cent quinze, au même lieu, déserté en présence de l’ennemi ?

8° L’accusé BRIGNON est-il coupable d’avoir, le deux octobre mil neuf cent quinze, au même lieu, déserté en présence de l’ennemi ?

 

Les voix recueillies séparément, conformément à l’article 131 du Code de justice militaire, en commençant par le grade inférieur, le Président ayant émis son opinion le dernier, le Conseil de guerre déclare :

Sur la 1ère question : Oui à l’unanimité.

Sur la 2ème question : Oui à l’unanimité.

Sur la 3ème question : Oui à l’unanimité.

Sur la 4ème question : Oui à la majorité de quatre vois contre une.

Sur la 5ème question : Oui à la majorité de quatre vois contre une.

Sur la 6ème question : Oui à la majorité de quatre vois contre une.

Sur la 7ème question : Oui à l’unanimité.

Sur la 8ème question : Oui à l’unanimité.

Sur quoi, et attendu les conclusions prises par le Commissaire du Gouvernement dans ses réquisitions, le Président a lu le texte de la loi, recueilli de nouveau les voix dans la forme prescrite par les articles 131 et 134 du Code de justice militaire pour l’application de la peine.

Le Conseil est rentré en séance publique, le Président a lu les motifs qui précèdent et le dispositif ci-dessous.

En conséquence, le conseil condamne à la majorité de quatre voix contre une, le soldat BRIGNON à la peine de mort par application des articles ci-après énoncés :

Article 135 du Code de justice militaire : « En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte est seule prononcée. »

Article 213 dudit Code : « Tout militaire qui abandonne son poste est puni : 1° de la peine de mort, si l’abandon a eu lieu en présence de l’ennemi ou de rebelles armés / 2° De deux ans à cinq ans d’emprisonnement si hors le cas prévu par le paragraphe précédent, l ‘abandon a eu lieu sur un territoire en état de guerre ou en état de siège / 3°......... »

Article 239 dudit Code : « Est puni de la détention tout déserteur en présence de l’ennemi ».

Article 267 dudit Code :  « Les tribunaux militaires appliquent les peines portées par les lois pénales ordinaires à tous les crimes ou délits non prescrits par le présent Code et dans ce cas il existe des circonstances atténuantes ».

Article 401, alinéa 4 du Code pénal : « Quiconque sachant qu’il est dans l’impossibilité absolue de payer, se sera fait servir des boissons ou des aliments qu’il aura consommés en tout ou partie, dans des établissements à ce destinés, sera puni d’un emprisonnement de six jours au moins et de six mois au plus, et d’une amande de seize francs au moins et de deux cents francs au plus.

Le Conseil condamne en autre BRIGNON aux frais envers l’Etat en vertu de l’article 139 du Code de justice militaire, ainsi conçu : « Le jugement qui prononce une peine contre l’accusé le condamne aux frais envers l’Etat... »

Dire au minimum, à l’unanimité, la durée de la contrainte par corps, conformément aux dispositions de l’article 9 de la loi du 22 juillet 1867, ainsi conçu : « La durée de la contrainte par corps est réglée ainsi qu’il suit : De deux jours à vingt jours lorsque l’amande et les autres condamnations n’excèdent pas cinquante francs.... ».

Enjoint au Commissaire du Gouvernement de faire donner immédiatement en sa présence lecture du présent jugement au soldat BRIGNON devant la garde rassemblée sous les armes.

(Les mentions suivantes sont biffées, à savoir : de (espace)  avertir que la loi (espace)  accorde un délai de trois jours-francs pour se pourvoir en cassation, ou de vingt-quatre heures pour se pourvoir en révision.).

Fait, clos et jugé sans désemparer, en séance publique, à Hersin-Coupigny, les jours, mois et an que dessus.

En conséquence, le Président de la république MANDE et ORDONNE à tous huissiers sur ce requis de mettre ledit jugement à exécution ; aux Procureurs généraux et aux procureurs de la république près les tribunaux de première instance d’y tenir la main ; à tous commandant et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par les Membres du Conseil et par le greffier.

Document signé par les 5 membres du tribunal.

L’an mil neuf cent quinze, le vingt-cinq septembre, le présent jugement a été lu par nous, Greffier soussigné, au soldat BRIGNON Julien, en présence du Commissaire du Gouvernement. Cette lecture faite en présence de la garde rassemblée sous les armes.

Le Commissaire du Gouvernement,                                                                     Le Greffier,

S-Lt TOUSSAINT-MAURIEE                                                                                                VIRIOT Henri

_______________________________________

EXECUTOIRE.

Vu la procédure instruite contre le soldat BRIGNON Julien et les frais d’icelle dont le détail suit :

1° Coût du transport des pièces et objets pouvant servir à conviction ou à décharge : 0 fr

2° Honoraires des officiers de santé, médecins, chirurgiens civils, sages-femmes, experts, interprètes, traducteurs et autres, appelés en justice : 0 fr

3° Indemnités accordés aux témoins civils et militaires : 0 fr

4° Frais de garde de scellés et ceux de mise en fourrière : 0 fr

5° Indemnités de route, de transport et de séjour, accordés aux membres des tribunaux militaire pour les déplacements auxquels l’instruction des procédures peut donner lieu, ainsi que toutes autres dépenses nécessitées : 0 fr

6° Port des lettres et paquets pour l’instruction, sauf le port des lettres résultant de l’application de la loi du 15 juin 1899 : 0 fr

7° Frais d’impression des arrêts, jugements et ordonnances de justice, quand il y a lieu : 0 fr

8° Prime de capture des contumas, des déserteurs et des insoumis : 0 fr

9° Frais résultant de l’obtention des extraits du casier judiciare : 0.25 fr

10° Prix du bulletin N° 1 et du duplicata dudit (décret du 12 décembre 1899, art 13) : 0.50 fr

11° Coût des bulletin N° 1 et du duplicata de ces bulletins établis par les greffiers des conseils de guerre au sujet des condamnations prononcées par ces conseils (décret du 12 décembre 1899, art 13) : 0fr 

12° Frais de procédure ou coût du jugement : 12 fr 00

13° Amande : 0 fr

14° Décimes additionnées (en France) : 0 fr

15° Frais fixes de procédure devant la cour de cassation ou le conseil de révision : 0 fr

16° Frais fixes de procédure devant le conseil de guerre jugeant en 2ème instance : 0 fr

Total : 12 fr 25.

Vu le dispositif du jugement définitif, l’article 139 du Code de justice militaire, le Président du Conseil de guerre permanent de la 43ème Division, liquide les frais dont l’état est ci-desus à la somme de 12 francs vingt-cinq centimes, du montant de laquelle il délivre le présent exutoire, pour le recouvrement de ladite somme être poursuivi sur les biens présents et à venir du condamné, par les percepteurs des Contributions directes.

En conséquence, le Président de la République MANDE et ORDONNE à tous huissiers sur ce requis de mettre ledit jugement à exécution ; aux Procureurs généraux et aux Procureurs de la République près les tribunaux de première instance d’y tenir la main ; à tous commandant et officiers de la force publique de préter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

Fait en la Chambre du Conseil de guerre susdit.

A Hersin-Coupigny (Pas-de-Calais) le vingt-cinq octobre mil neuf cent quinze.

Le Président,

 

___________________________________

Le rapporteur Commissaire du Gouvernement près le Conseil de Guerre de la 43ème Division.

A

Monsieur le Général commandant la 43ème Division d’Infanterie.

En vous transmettant le dossier BRIGNON Julien condamné le 25 octobre (1915) à la peine de mort pour abandon de poste en présence de l’ennemi _ désertion _ grivèlerie.

J’ai l’honneur, conformément à l’article 146 du Code de justice militaire, de vous demander d’ordonner l’éxécution de la peine.

                                               Au quartier général le 26 octobre 1915.

                                                           Toussain

 

Décision du Général LOMBARD, commandant la 43ème Division

            L’éxécution de la peine aura lieu le 27 octobre 1915 à 7 heures.

 

                                   Q.G le 26 octobre 1915.

                                   Général De Maud’Huy

Procès-verbal d’exécution à mort.

_________________________________________

 

L’an mil neuf cent quinze,

Le vingt-sept octobre à sept heures (matin)

A Hersin-Coupigny (Pas-de-Calais)

Il a été procédé ainsi qu’il suit , en vertu des ordres de M. Le Général commandant la 43ème Division, en date du vigt-six octobre mil neuf cent quinze, à l’exécution du jugement rendu le vingt cinq octobre précédant par le Conseil de guerre aux armées de la 43ème Division d’Infanterie, qui a condamné à la peine de mort pour grivèlerie, désertion en présence de l’ennemi et abandon de poste en présence de l’ennemi, le soldat de 2ème classe BRIGNON Julien du 149ème Régiment d’Infanterie, 3ème compagnie, né le 4 février 1887 à Vakenbach (Alsace-Lorraine), fils de Albert (BRIGNON) et de ADRIAN Virginie, bûcheron, demeurant avant son entrée au service à Moussey (Vosges).

Le condamné ayant été déplacé au lieu de l’exécution, nous VIRIOT Henri, greffier dudit Conseil de guerre, avons donné lecture du jugement précité.

Le condamné a été passé par les armes conformément aux réglement militaire par un piquet du 149ème Régiment d’Infanterie et est tombé mort ainsi que l’a constaté le médecin-major commis à cet effet.

Le tout en présence de M. L’adjudant PETIT du 12ème Régiment d’artillerie de campagne, l’un des juges du Conseil de guerre devant lequel le condamné avait comparu, désigné à cet effet par le Président, en présence des troupes du cantonnement en armes et en notre présence.

En foi de quoi nous avons dressé le présent procès-verbal, les jours, mois et an susdits.

L’officier d’administration greffier.

VIRIOT Henri.

 

 

Documents originaux à lire sur le site « memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr », première guerre mondiale, fusillés de la Première Guerre mondiale.

Documents : SHD GR 11 J 1504                    SHD GR 11 J 1495

 

 

 

Fiche NMPF

 

 

 

 

 

 

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  • Histoire des combats et des unités ayant pris part aux batailles sur le secteur de l'Artois durant les années 14/18. Du Nord d'Arras à la limite de Noeux-les-Mines, tous les sites où se sont déroulés les terribles combats qui ont tué toute une jeunesse.
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